jeudi 21 novembre 2013

Polke Sigmar.


Né en 1941 en Silésie (Pologne), il  passe de l’Allemagne de l’est à l’ouest.
II travaille chez un maître verrier, et suit les cours aux beaux arts de Düsseldorf où Beuys enseigne. Avec Richter il forme l’attelage éphémère du « réalisme capitaliste », à lire comme une réponse au « réalisme socialiste » mais aussi au pop art. Tous deux d’origine protestante, c’est  le froid qui rencontre le chaud. Polke portant sur le monde et l’art un regard amusé.
Chercheur, expérimentateur, il va à l’encontre de la notion de style en entretenant les ambigüités, les ambivalences, si bien que ce trait deviendra une écriture.
Il multiplie les supports, tend des tissus sur les toiles puis sur les châssis (couvertures, torchons, tapis de bain…). Erigeant la banalité au rang d’œuvre d’art, il reprend la trame de photographies en peignant lui-même les petits points, ne recourant ni à la sérigraphie ni aux pochoirs. Il passe de la peinture gestuelle à l’abstraction, et évite l’académisme qui a atteint  aussi cette manière, en introduisant  des éléments figuratifs.
Des substances chimiques diverses (vernis, cire, mica…) se retrouvent sur ses toiles. Il réintroduit des poisons (orpiment à l’arsenic), des pierres précieuses (lapis-lazuli) qui avaient disparu de l’attirail des peintres.
Il essaye toutes sortes de drogues afin de pousser « les portes de la perception » telles que les nommait Huxley.
Sa rencontre avec des aborigènes l’amène à approfondir ses propres démarches : le symbolisme des couleurs et les pigments fabriqués, le versant sacré des productions.
Il change de format et va plus loin dans ses recherches sur la matière picturale ; l’introduction de couleurs thermosensibles joue avec la notion du temps.
Il met le monde sans dessus dessous, peint à l’arrière de supports transparents, et rejoint Vinci qui conseillait à ses élèves en mal d’inspiration d’aller voir les murs tachés de pluie où dans ses batailles l’informe crée la forme.
Il ne se cantonne pas à un domaine chamanique,  alchimique, il s’intéresse à la politique avec une série de tableaux sur la révolution française exposés  à Vizille en 2001.

La peinture, qui représente la foule se pressant à l’exposition sur l’ « Art dégénéré » organisée par les nazis, se craquèle. Le temps fait son affaire.
Les images se superposent, se devinent, se cachent, les matériaux se mélangent, s’allient.
La conférence de Guy Tosato n’était pas qu’un exercice obligé mais le partage d’une fidélité : le peintre disparu en 2010 était l’objet de sa conférence inaugurale aux amis du musée de Grenoble qui compte désormais dans ses collections « l’homme donnant du grain à ses poules » dont nous picorons volontiers quelques petits points ironiques.
Nous apprécions aussi l’interprétation du « Madame de Senonnes » d’Ingres qui figure sur les affiches : c’était une commande du directeur actuel du musée de la place de Lavalette lorsqu’à Nantes il faisait dialoguer l’art contemporain avec les œuvres du musée des beaux arts.
Jusqu’à début février les œuvres les plus récentes de Polke sont chez nous, avant la rétrospective au MoMA de New York.
Créateur aimé de ses confrères, sa peinture dynamique réclame de nouvelles perspectives à la peinture. « Que la magie de l’art advienne !» Encore.

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